Il y a 5 ans, 10h17...

Publié le par Civetta

Il y a cinq ans, à 10h17, je suis dans le petit hangar à vélos de mon immeuble. Je vais partir faire des courses, et soudain, un bruit assourdissant, qui fait étrangement écho au cauchemar que j'ai fait dans la nuit (à cause du 11 septembre sans doute, j'ai rêvé que la foudre s'abattait sur le Capitole, et que tout le monde devait courir aux abris): c'est brutal et d'une violence inouïe, c'est comme si un avion s’était écrasé dans la rue, là derrière l’immeuble. Immédiatement après, dans un silence tout aussi assourdissant, les 10 étages au-dessus de ma tête, et au-dessus du petit hangar, se mettent à vibrer comme en un tremblement de terre et comme s’ils allaient s’écrouler, et puis j'aperçois effrayée des bouts de verres, tombant soudain en pluie au travers de la petite fenêtre grillagée... Je me souviens m’être demandée si je devais sortir du hangar ou y rester à l'abri, s’il valait mieux rester dans la rue, (j’ai d'abord cru à un bombardement), ou remonter chez moi. J'attends un peu, tremblante, l'oreille tendue, le coeur battant... Rien, pas de nouvelles explosion (bombe?).... Je décide de me risquer à sortir dans la cour, puis dans la rue... Tout le monde est dehors, au milieu de la route, sur les trottoirs, l'air mi-hébété mi-interrogatif, et le long des allées de Brienne, on marche partout sur du verre projeté des fenêtres, vitres ou vitrines. J'appelle immédiatement ma tante, à Paris, pour savoir si elle a entendu quelque chose à la radio ou la télé, parce que je n'ose remonter chez moi pour tenter d'écouter les infos. Elle ne sait rien, mais elle va bien, Paris n'a pas été bombardé; j'ai le temps d'appeler mes parents en Auvergne, leur disant d'allumer la télé ou la radio, de me prévenir, car je suis sûre que quelque chose est arrivé à Toulouse, je ne sais pas quoi, mais j'ai l'impression que c'est très grave... L'instant d'après, tout coup de fil est impossible. Une voisine revient, haletante, du centre de Toulouse, l'air affolée, les yeux hagards, assurant que plusieurs bombes ont explosé un peu partout en centre-ville, qu'elle a vu du sang partout... Une autre sort de chez elle, elle raconte qu'elle était tranquillement assise sur son divan, et qu'elle s'est soudain sentie soulevée de dix centimètres au-dessus... Un monsieur arrive peu après, au bout d'une demi-heure environ, disant “c’est l’ONIA”. Moi, toulousaine depuis même pas un an, je ne savais pas ce que cela voulait dire. Je l’ai compris dans les heures qui ont suivi. Le monsieur venait de conduire un blessé d’AZF avec son véhicule, à Purpan; il ajouta qu’il l’avait ramassé en sang et qu’il n'avait pas trop regardé, que l'homme était blessé aux yeux, que ça n'était pas beau à voir. Après, il y a eu un silence de mort dans le quartier: aucune ambulance, aucune sirène, rien. Elles étaient toutes de l’autre côté, au Sud, au coeur du drame. À 4 km de là à vol d’oiseau.
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